Et encore une autre Saint-Valentin “Fifty shades of Grey”

Aucun domaine ou presque n’échappe aux Diktats de la mode. Et la sexualité n’échappe pas à la règle. Après la mode des Sex-Toys, surexploitée et déclinée à l’infini et à la limite de l’overdose, puis celle du libertinage « home-made », plus récente, il semble bien que la mode du « SM Soft » soit la tendance du moment… Retour sur ces pratiques aux multiples facettes qui, plus de deux ans après la parution du Best-Seller mondial « Fifty Shades of Grey », ne semblent pas s’essouffler…

 

 

Si les qualités littéraires des trois tomes du roman d’E.L. James sont à ranger aux antipodes de l’œuvre de Tolstoï, il est en revanche certain que la mode du « Mommy Porn » – comme l’on ainsi qualifié les journalistes américains – a trouvé avec cet ouvrage son « manuel de référence ». Rien que de relativement classique au départ pourtant : L’initiation d’une jeune étudiante, vierge de surcroît, aux plaisirs de la chair et des relations dominant/dominé, par un homme plus âgé, plutôt manipulateur et volontiers pervers à ses heures…

De l’aveu de son auteur, et même si le roman a depuis lors été lu par bon nombre d’hommes, il a été initialement écrit pour les femmes… Et c’est sans doute là que réside la nouveauté et par suite le succès rencontré. Comme une sorte de « porno-soft » mâtiné de sadomasochisme, destiné aux mères au foyer désœuvrées. Il n’en reste pas moins que cet « objet littéraire mal identifié » a enclenché une véritable déferlante jusqu’alors inédite d’activités et d’objets en rapport avec lui ; et c’est ainsi que l’on a récemment vu fleurir dans les boutiques spécialisées des objets et accessoires en lien avec le SM Soft, ainsi que nombre de fêtes et soirées à thème, reprenant elles aussi à leur compte la trame et « l’univers » du Best-Seller.

Et si tout cela n’était finalement pas si nouveau ni véritablement subversif…

Une équipe de chercheurs canadiens s’est récemment penché sur le phénomène, en se demandant si les pratiques et jeux sexuels incluant un rapport dominant/dominé ne constituaient finalement pas que le reflet d’un fantasme assez répandu au sein de la population…

En les résultats sont surprenants ! Sur 799 femmes et 717 hommes interrogés par Internet, et même si les fantasmes BDSM n’arrivent pas dans le top-5 des fantasmes les plus répandus, ils figurent en bonne place et, plus étonnant, les fantasmes de soumission (généralement plutôt attribués aux femmes) sont également plutôt courants chez les hommes.

Attention tout de même à bien faire la distinction entre fantasme (projection mentale totalement contrôlée) et véritable envie de passage à l’acte…

Ref : Joyal CC, Cossette A, and Lapierre V. What exactly is an unusual sexual fantasy? J Sex Med, 2014

De l’impréparation au fiasco…

Comme toute pratique en marge  des chemins balisés, il convient tout même de poser quelques jalons avec son partenaire afin d’éviter les déconvenues… Rania, 42 ans, évoque avec nous sa récente expérience plus que mitigée avec son conjoint Elie.

« En rentrant un soir il y a quelques mois, je découvris sur la commode, dans l’entrée, un exemplaire du fameux bouquin d’E.L. James, « 50 Nuances de Grey », qui avait visiblement été lu, et dans lequel était glissée une note sur un post-it : « Bonne lecture et à dans deux semaines », signée de la main de mon mari Elie. Il venait de partir en voyage pour le travail et avait visiblement lu le livre en question sans que je ne m’en aperçoive. Et voilà que maintenant il m’en recommandait la lecture… Curieux… Reste que plutôt intriguée, j’attaquais quelques jours plus tard le premier tome du roman. Pas franchement esbaudie par les qualités stylistiques de la chose, je dois tout de même reconnaître avoir tout de même été émoustillée par certains passages. Je commençais doucement à comprendre ou Elie voulait en venir, lui qui n’est pas à proprement parler un littéraire. Il avait visiblement quelque chose en tête… A son retour de Londres, mon intuition fut confirmée. Monsieur avait fait des emplettes sur place, et celles-ci étaient plutôt connotées… Combinaison en latex, martinets, et autres accessoires qui rappelaient étrangement quelques uns des scénarios narrés dans le roman. Sans grande préparation je dois le reconnaître, je me suis accoutrée un  soir avec quelques uns de ces gadgets, et décidais d’attendre Elie ainsi parée… Il a été littéralement pris de cours lors de son arrivée, et rien ne s’est déroulé comme je l’avais imaginé. En fait, nous aurions dû préparer un scénario à l’avance et laisser monter l’excitation. Au lieu de cela, tout est resté d’une platitude consternante. J’ai enlevé mon « déguisement » et nous avons fait l’amour de manière « conventionnelle »… Nous n’avons plus jamais rouvert ce dossier… »

La sexualité étant aussi une affaire de dialogue, cela est encore plus vrai lorsque l’on s’éloigne des sentiers battus. Mettre en place un jeu de rôle pour une séance BDSM ne s’improvise pas. Il est nécessaire que les partenaires en parlent entre eux au préalable, fixent des règles et des limites, et laissent monter le désir ainsi que l’excitation liés audit scénario. Une « attaque » trop frontale comme celle adoptée par Rania est souvent source d’échec.

La compatibilité des désirs de l’un avec ceux de l’autre est un point essentiel. Ici, il semble que notre témoin avait accepté le principe de la demande de son conjoint. Hélas, faute d’en avoir parlé ensemble, cela n’a rien donné.

Quelques règles de base avant de passer à l’action…

Avant de s’adonner à des jeux de nature SM-Soft, il est préférable de mettre en place quelques règles, afin de s’assurer que chacun soit satisfait :

1/ Le Consentement de chacun : un pré-requis indispensable 

Que vous souhaitez jouer le rôle du dominant ou du dominé, il est impératif de communiquer votre pulsion à votre conjoint. Etant dans un domaine un peu hors du commun, autant y aller à pas de loup… Alors éviter autant que possible les mise en jeu trop abruptes de type « mon amour, j’ai été une vilaine fille, attache-moi au radiateur et donne-moi quelques coups de martinet que j’ai amplement mérité »… Privilégier une amorce plus soft en évoquant par exemple une lecture coquine récente, et voyez la réaction de l’autre. S’il demande de plus amples détails, l’affaire est bien engagée !

2/ Des limites bien tracées

Si la phase 1 s’est bien passée, il est alors temps de mettre en place un système de communication bien défini. L’acronyme BDSM recouvrant de nombreuses pratiques pouvant être très différentes les unes des autres, mieux vaut savoir dans quoi on se lance…

Expliquez à l’autre jusqu’où vous êtres prêt(e) à aller, en lui demandant à lui (elle) aussi ses propres limites. Par exemple, si les coups de martinet ne sont pas votre tasse de thé, autant le dire tout de suite. Même chose avec les liens : Les menottes peuvent paraître « too-much » pour certain(e)s, alors que les baillons peuvent par exemple être le « must » pour d’autres… Bref, n’hésitez pas à élaborer votre propre scénario…

3/ Shopping !!

Il n’est pas nécessaire de dévaliser la boutique spécialisée du coin (surtout quand il n’y en a pas vraiment de disponible comme ici au Liban !) pour pratiquer le SM-Soft. Ayez recours à votre imagination pour transformer un objet du quotidien en redoutable accessoire de soumission ! Un simple foulard peut s’avérer être très utile s’il on est suffisamment créatif : Bander les yeux, s’attacher aux barreaux du lit. Les objets utilisés sont bien évidemment au cœur de ces pratiques, et la notion de ritualisation qui s’y attache est elle aussi importante. Une petite robe en latex, du type de celle évoquée lors du précédent témoignage peut enclencher l’engrenage de la soumission…

4/ Un soft « launching »

Il est vrai que les Clubs S.M. étant rares dans nos contrées, il est de toute façon plus que probable que les « primo-adeptes » s’initieront à domicile… Mais pour ceux qui la chance de pouvoir voyager dans des régions du monde où ce genre d’établissements existe, il reste conseillé de débuter à domicile. Les pratiques parfois extrêmes dont on peut être témoin dans ce genre d’endroit (même si cela reste toujours entre adultes consentants) pourraient faire renoncer avant même d’avoir essayé… Privilégier une approche en douceur, dans le cadre rassurant du domicile, autour d’un dîner romantique, prémices d’une soirée plus « hard ». Et gardez l’expérience des clubs pour plus tard, lorsque vous serez rôdés, et que vous saurez vraiment ce qui vous plaît et jusqu’où vous êtes prêts à aller ensemble.

5/  On n’oublie pas le garde-fou !

Dernier point, mais sans doute également l’un des plus importants, mettre un place un code pour arrêter immédiatement l’expérience si les choses vont trop loin au goût de l’un des deux. Simplement un mot, ou un geste si la situation vous conduit à ne pas pouvoir vous exprimer par la parole (en cas d’utilisation de baillons par exemple). Cela évitera tout dérapage, et permettra de revenir en mode soft/amoureux, afin de mieux retenter l’expérience la fois suivante…

 

Chacun son style…

Maintenant que les règles du jeu sont posées, n’omettez pas que les pratiques BDSM sont aussi une affaire de caractère, d’envies et de degré. Ainsi une pratique jugée très « Hard » par quelqu’un pourra s’avérer plutôt banale pour une autre.

Antoine, 28 ans, nous raconte comment, après avoir clairement défini les limites et les règles du jeu avec son épouse Dina, ils sont allés « crescendo » dans leurs expérimentations.

« Je suis issu d’une famille très conservatrice sur tout les sujets ayant trait à la sexualité, comme beaucoup de gens dans la région j’imagine. Je me suis marié puceau, et je ne savais pas que Dina était beaucoup plus délurée que moi… Aussi, lors de nos premiers échanges amoureux au début de notre mariage, j’avais déjà l’impression de franchir les limites d’une sexualité conventionnelle lorsqu’elle me demandait de la prendre en levrette… Et je ne vous parle pas de ma tête lorsqu’au bout de quelques semaines, elle me demanda de la fesser lorsque nous faisions l’amour dans cette position. Cela m’a bloqué pendant un certain temps. Et puis nous en avons parlé ensemble, nous avons mis des mots clairs sur tout cela et posé des limites. Sans que je m’en rende vraiment compte, j’ai pris goût à ces pratiques qui me semblaient au début pour le moins perverses. Nous avons par la suite rapporté de voyage quelques accessoires et tenues  plus explicites, et que je crois que je suis maintenant un vrai adepte !! Notre prochain « challenge », d’un commun accord, est de nous rendre en club lors de notre prochain passage à Paris… »

Comme l’explique Antoine, apprendre, fixer des limites et les respecter est sans doute l’une des clefs… C’est son épouse Dina qui vient compléter son propos :

« Il est vrai que je n’imaginais pas la réaction initiale d’Antoine à mes demandes que je considérais plus que « soft »… Mais je pense que nous avons appris ensemble à faire une différence très nette en SM Soft et pratiques vraiment « trash ». Par exemple, les histoires de coups de fouets et de domination dégradantes à grands coups de talons aiguilles, ou de la cire de bougie sur les tétons, ça n’est vraiment pas notre truc. Mais les liens, les fessées et quelques accessoires de type pinces à tétons etc. font partie de notre attirail régulier. En revanche, je crois qu’il ne faut pas que ces pratiques entre nous deviennent systématiques. Je crois qu’il faut savoir conserver une sexualité « classique » de manière régulière. Le risque étant, si l’on abuse des pratiques SM, de ne plus pouvoir atteindre le plaisir que par ce biais. »

La dernière remarque de Dina est très intéressante, en ceci qu’elle évoque les risques de « l’exclusivité ». Nisrine, 34 ans, a quant à elle sombré dans une sorte d’addiction dont elle est sortie non sans mal :

« J’ai été initiée par mon premier mari, et je dois admettre que j’y ai pris goût. Un peu trop même… Au bout de 2 ans, les rapports classiques m’ennuyaient au plus haut point et je ne pouvais atteindre l’orgasme qu’en des circonstances de dominations, et plus particulièrement de bondage (le fameux « art du Shibari » comme l’appellent les japonais). Cela nous a conduit au divorce. Ce n’est que depuis lors que, non sans mal, et avec mon nouveau compagnon qui est plus mesuré, j’ai retrouvé une sexualité plus « conventionnelle », alternant les pratiques SM et les rapports classiques. »

Bref, dans ce domaine relativement particulier, il est impératif de toujours conserver une certaine mesure, qui permet à la sexualité de chacun de rester « diverse » sans tomber dans l’exclusive.

Quelques lectures initiatiques…

Afin de mettre enfin de côté ce fameux roman américain dont il est vrai que l’on commence à se lasser, petite biblio non-exhaustive sur le sujet :

1/ Le Classique des Classiques pour debuter: « Histoire d’O », de Pauline Réage. Même « Pitch » que le roman d’E.L. James, relatant l’initiation d’une ingénue, en beaucoup mieux écrit… Et son adaptation cinématographique par Just Jaeckin en 1975, qui révéla la comédienne Corinne Cléry (Plus tard « James Bond Girl » dans « Moonraker » de Lewis Gilbert (1979)) ;

2/ Un cran plus « trash : « Frappe-Moi », de Mélanie Muller, totalement centré sur la progession du désir.

3/ Pour aller un peu plus loin : Dans la collection « Osez… » des Editions de la Musardine (disponibles chez Virgin au Liban !), « Osez – 20 histoires de Soumission et Domination » : Sous formes de nouvelles plus ou moins sulfureuses, des récits initiatiques plutôt bien écrits.

4/ Une version française de « Mommy Porn », en plus cru : « Carnets d’une soumise de province », de Caroline Lamarche

5/ Un guide pour les novices : Enfin, et il s’agit là plutôt d’un guide au titre volontairement racoleur : « 50 Nuances de Plaisir », de Marisa Bennett, regorgeant de conseils et idées coquines pour vous initier au pratiques BDSM à votre rythme

 

LA Saint Valentin est la, osez le SM Soft !

Et pourquoi pas une Saint Valentin « Fifty Shades of Grey » ? Sans tomber immédiatement dans le « Trash », pourquoi ne pas pimenter le traditionnel diner romantique avec quelques accessoires et scénarios SM élaborés conjointement avec votre amoureux(se) ? Une fois de plus, il ne s’agit pas nécessairement de l’attacher au lit déguisée en dominatrixl perverse entièrement vétue de cuir rouge (quoique cela peut avoir son charme pour certains !), mais il est possible de commencer plus soft avec des boules de Geisha, une paire de menottes, de la lingerie un peu plus « Olé-Olé » que d’habitude (type culotte fendue etc.), des clips à tétons, ou divers type de Plugs…

Les boutiques spécialisées proposent en ligne des options pour tout les goûts et tout les budgets. Ou sinon, faites ramener cela de l’étranger par une personne de confiance !

Bonus Valentin

Idées Cadeaux…

1/ Pour ceux qui n’ont pas été sages…Pour les adeptes de la fessée, le « paddle » sorte de spatule en plastique souple ou plus rigide, pour corriger les vilain(e)s

2/ Un bijou en cuir : A destination de ceux qui préfèrent s’attacher aux barreaux du lit ou au radiateur, le collier de cuir avec anneaux d’entrave est un must !

3/ Des bougies pas si romantiques… Avis aux amateurs de sensations physiques un peu plus extrêmes : procurez-vous un jeu de bougie à cire froide (aucun risque de brûlure si elles sont utilisées à bonne distance de la peau, c’est-à-dire à au moins 20 centimètres) ;

4/ Du latex pour tous les gouts : Les cagoules, combinaisons, string, culottes en latex (ouvertes ou non aux endroits stratégiques…) sont également assez répandues, et se coordonnent plutôt bien avec le collier de cuir…

5/ Pince-moi, je rêve : Les « pinces-à-seins » présentent quant à elles l’avantage d’être applicable à madame ou à monsieur… Tout simplement métalliques, ou encore en plastique et ornés de plumes pour une version plus soft. Prudence tout de même avec le niveau de serrage de l’ustensile !

6/ Silence ! On tourne : Les différents types de bâillons viennent idéalement compléter la panoplie, qu’ils soient en cuir, en matière plastique ou en étoffe, pour étouffer les cris et gémissements de votre « victime »!

7/ Des dessous pas si chics : La lingerie n’est pas non plus à négliger, des guêpières en soie quasi transparentes au bas et porte-jarretelles aux couleurs suggestives, en passant par les culottes et soutien-gorge « fendu », le choix est également vaste..